Un système d’exploitation pour traquer les migrants en quasi-temps réel

Aux États-Unis, l’Immigration and Customs Enforcement (ICE), agence fédérale en charge du contrôle des frontières, vient de confier à Palantir un contrat de 30 millions de dollars. L’objectif : développer une plateforme dénommée ImmigrationOS (Immigration Lifecycle Operating System) capable d’offrir une « visibilité quasi en temps réel » sur les démarches d’auto-expulsion des migrants irréguliers. Ce nouvel outil doit notamment aider l’ICE à sélectionner les personnes à expulser en priorité, en se basant sur des critères allant du dépassement de la durée de visa à l’appartenance à des réseaux criminels.

Un contexte politique très dur

Ce projet intervient au cœur d’une politique migratoire renforcée sous l’administration Trump, qui a multiplié les mesures pour accélérer les expulsions volontaires et forcées. Des dizaines de milliers de personnes, y compris des titulaires de visas étudiants ou de cartes vertes, se sont vu retirer brutalement leur autorisation de séjour, avec un délai souvent de quelques semaines pour quitter le pays. L’ICE n’ayant pas d’outil performant pour suivre ces départs, elle subit des « limitations graves » dans sa capacité à repérer les personnes qui restent au-delà de l’expiration de leur visa.

Palantir, un partenaire de longue date

Fondée par Peter Thiel, la société Palantir est réputée pour ses technologies de big data et d’analyse avancée. Elle travaille avec l’ICE depuis 2011, ainsi qu’avec d’autres agences fédérales (armée, FBI, IRS). Son implication prolongée lui a conféré « une connaissance institutionnelle approfondie » des opérations de l’ICE, justifiant, selon l’agence, qu’aucun autre prestataire ne soit en mesure de fournir un prototype opérationnel aussi rapidement et sans retards « inacceptables ».

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Trois fonctions clés d’ImmigrationOS

Le document fédéral dévoilant le contrat détaille les trois fonctionnalités principales attendues dans la plateforme :

  • Targeting and enforcement prioritization : cette fonction doit simplifier la sélection et l’arrestation des « étrangers illégaux », en plaçant en tête de liste les criminels violents, les membres de gangs – notamment MS-13 et Tren de Aragua – et ceux ayant dépassé la durée légale de leur visa.
  • Tracking des auto-expulsions : pour la première fois, l’ICE disposera d’un suivi en quasi-temps réel des départs volontaires, avec un calcul précis des « métriques de sortie ». L’agence espère ainsi éviter les doublons, les erreurs de comptage et disposer de rapports fiables à tout instant.
  • Immigration Lifecycle Process : cette dernière brique vise à accélérer l’identification des personnes ciblées et à optimiser la logistique des expulsions. L’idée est de réduire les délais administratifs et d’organiser efficacement les départs forcés ou volontaires.

Une plateforme intégrant de multiples sources de données

Pour alimenter ImmigrationOS, Palantir exploitera divers flux d’informations : bases de données biométriques et biographiques, registres des autorités aéroportuaires, systèmes de lecture automatisée des plaques minéralogiques, et potentiellement des données issues de la Social Security Administration ou d’autres agences. Ce recoupement de sources vise à construire un profil exhaustif : pays d’origine, mode d’entrée (visa, asile, programme DACA…), durée de séjour, éventuels antécédents criminels ou infractions administratives.

Délais et périmètre du contrat

Le prototype d’ImmigrationOS doit être livré au plus tard le 25 septembre de cette année, avec une phase contractuelle courant jusqu’en septembre 2027. D’ici là, l’ICE compte déployer progressivement les fonctionnalités pour couvrir d’abord les procédures de suivi des auto-expulsions, puis la priorisation des arrestations et enfin l’accélération des expulsions logistiques.

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Enjeux humains et éthiques

Ce type de plateforme soulève de nombreuses questions :

  • Vie privée et surveillance de masse : l’agrégation de données hautement sensibles et le suivi en temps réel exposent les migrants à une traçabilité quasi permanente.
  • Risques de discrimination : les algorithmes de priorisation peuvent renforcer des biais existants, par exemple en ciblant certaines nationalités ou communautés de manière disproportionnée.
  • Responsabilité et transparence : qui sera garant de l’exactitude des données et des critères de priorisation ? Les migrants auront-ils accès à leur profil et à un recours en cas d’erreur ?
  • Impact sur la confiance publique : la mise en œuvre de technologies de big data dans des procédures sensibles peut éroder la confiance des communautés concernées et des citoyens en général.

Une politique toujours plus automatisée

Avec ImmigrationOS, l’ICE poursuit sa mutation vers une agence toujours plus numérisée et automatisée. La dépendance accrue à des prestataires comme Palantir illustre la volonté de l’administration d’accélérer les expulsions grâce à des outils d’analyse sophistiqués. Mais cette augmentation de l’efficacité bureaucratique risque de creuser un fossé entre la dimension humaine du droit d’asile et la logique froide des algorithmes.

Des conséquences à mesurer

Alors que l’ICE invoque « un besoin urgent et impérieux » pour protéger la sécurité nationale et accélérer la lutte contre les gangs, les défenseurs des droits des migrants s’alarment déjà des dérives potentielles. ImmigrationOS, s’il tient ses promesses de traçabilité et de priorisation, pourrait devenir un instrument de coercition inédit. Il appartiendra aux tribunaux, aux organisations de défense et aux législateurs d’encadrer ces nouveaux outils pour garantir un juste équilibre entre sécurité et respect des droits fondamentaux.

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By Octave